"LA FEMME" DANS LA LITTERATURE NATURALISTE
L'histoire des femmes et de leurs rôles passe par l'histoire de leur corps. Corps, tantôt nié et refoulé, tantôt objet d'un véritable culte. Ce corps méconnu des femmes elles-même, a été célébré, décodé, disséqué par les penseurs, les médecins, les écrivains pendan 949d39j t des siècles d'histoire, et notamment dans la littérature.
Le XIX ème siècle a réservé à la femme une place de prédilection. Les femmes ont un rôle très marquant aussi dans l'oeuvre de Maupassant et plus particulièrement dans" Bel Ami."
"Bel Ami"[1] s'inscrit dans la lignée des romans naturalistes de son époque. Il répond aussi aux critères exposés par Goncourt dans sa préface à "Chérie"[2], dans laquelle l'auteur préconise un naturalisme des milieux aisés, tandis que le naturalisme tel que l'a défini Zola prétend appliquer à l'étude des comportements humains la méthode des sciences expérimentales. L'intérêt de ce dernier est surtout orienté vers les milieux populaires et les bas-fonds de la société.
Naturalisme et réalisme sont indissociables dans l'oeuvre de Maupassant. Ces deux courants artistiques sont une réaction au romantisme qui mettait essentiellement l'accent sur la place des sentiments et l'exaltation du « moi ».
L'écrivain réaliste parcourt le monde de son regard critique, rien ne lui échappe, il est à l'affût du moindre détail. Stendhal et Balzac en ont ouvert la voie ; Zola l'exploitera différemment, de façon plus sombre encore.Sans les femmes, le personnage principal du roman n'aurait aucune raison d'exister.
Sa vie prendrait alors un tournant de morosité et d'ennui affligeants et aucun thème abordé dans le récit n'aurait de sens. L'ascension sociale de Duroy se réalise grâce à ces personnages adjuvants. Elles sont omniprésentes et servent à la progression du récit tout comme à l'évolution de Bel Ami.
Au début du roman, Duroy est en manque d'amour et c'est Rachel qu'il croisera en premier sur son chemin. Rachel est une prostituée, une de celles que le lecteur rencontre souvent dans l'oeuvre de Maupassant. Vulgaire et grossière, elle est le reflet d'une société de fin de siècle et plus particulièrement d'un endroit considéré dégradant comme les Folies Bergère.
Mme de Marelle, qui deviendra rapidement la maîtresse de Duroy est un exemple de maîtresse parfaite. Elle est séduisante, attirante et fait preuve d'une grande indulgence. Contrairement à Madeleine Forestier(, l'épouse de son ami. C'est une « jeune femme blonde et jolie »), elle a d'autres préoccupations, elle apprécie l'amusement et l'amour. Elle n'hésite pas, pour garder son amant, à dépenser de l'argent. Elle apparaît tout au long du roman jusqu'à la dernière page où son rôle de maîtresse se poursuit.
Mme Walter est la deuxième maîtresse de Duroy. Une femme qui découvre le plaisir sur le tard. Avant sa rencontre avec Duroy, elle était « une de ces femmes dont on n'a jamais rien murmuré ». Elle tombe très vite sous le charme de "Bel Ami" mais résiste avant de s'offrir à lui. Sa conquête s'apparente à une stratégie : Duroy, possédant la femme de son patron, peut à présent concrétiser ses rêves ambitieux, intime de la famille, il en deviendra membre en séduisant Suzanne.
Suzanne est la dernière femme du roman qui aimera Duroy. Cette « frêle poupée blonde, trop petite mais fine, avec la taille mince » marque la dernière étape de l'évolution du personnage. Elle représente la jeunesse et l'innocence dans un monde corrompu. Elle se donne entière à Duroy, accepte de se faire enlever de lui sans se douter que ce dernier veut l'épouser par intérêt. En effet, sa dot de dix millions de francs lui permettra de monter encore socialement.
Toutes les femmes dans le roman sont des facteurs d'élévation sociale. La séduction semble ici indissociable de l'amour de la réussite et par conséquent de l'argent et du pouvoir.
" Marthe" est le premier roman de Joris-Karl Huysmans (1848-1907) publié en septembre 1876. Auparavant, le petit fonctionnaire du Ministère de l'Intérieur avait publié un recueil de poésies en prose, "Le Drageoir aux épices" , en 1874. Ce n'est qu'en 1884, avec A Rebours, que Huysmans rompt définitivement et officiellement avec Zola et le roman naturaliste. Mais, comme le note Marc Fumaroli dans sa préface (A Rebours, Folio): "En dépit des avantages publicitaires que valut à Huysmans son appartenance à la "bande à Zola", il n'y occupa qu'une place à part".
Et dès ce premier roman, Huysmans se distingue du naturalisme scientifique par son empathie, consciente ou non, avec ses personnages en déroute, figures dégingandées issues de la lie de la société parisienne. Ici, l'auteur soupçonne et indique de manière poignante des fêlures, plus qu'il ne dresse un tableau clinique ou sociologique.
Marthe , belle jeune fille à la dérive, est le personnage central de ce court roman qui nous conduira d'une scène de théâtre à une table de dissection, en passant par des bordels, des nuits parisiennes interlopes, des appartements plus ou moins miteux, et d'autres bouges. Marthe, tour à tour ouvrière, théâtreuse, fille de joie, femme au foyer, entraîneuse. Flux et reflux de la déchéance. Et sur la plage déserte d'illusions et jonchée de flacons d'alcool, gisent d'autres personnages: Ginginet le cabotin soûlographe et directeur de troupe de théâtre, Léo journaliste en déshérence.
Chaque chapitre est une peinture âcre et cruelle de la vie de Marthe. La langue de Huysmans y est tantôt précise et relevée, tantôt gouailleuse et directe .
Un des "romanciers naturalistes" les plus importants, consideré ainsi par le grand Zola,dans "LES ROMANCIERS NATURALISTES" ,Honoré de Balzac, romancier de la femme par excellence, s'est intéressé à elle sous des aspects multiples : il a représenté son corps,son temperament,ses passions, ses amours comblee ou deuces,ses souffrances,ses larmes douces
et amères, ses émotions, des plus agréables aux plus douloureuses, ses maladies.
Balzac met en scène, d'une part, des héroïnes qui ne sont que des variations sur le thème de la femme-ange, abandonnée, persécutée et victime de sa condition sociale ou de sa passion comme Eugénie Grandet[6], Ursule Mirouët ou Henriette de Mortsauf ;et d'autre part, des personnages féminins dotés d'une sensualité extrême et d'un esprit acariâtre et diabolique, et qui sont dépourvus de cette sensibilité inhérente à la nature feminine comme Lady Dudley , Foeodora ou encore Valérie Marneffe . A la fois créatrices et destructrices, ces passions animent sans cesse l'univers de Balzac qui voit en elles le principe dynamisant et dévastateur de toute existence. Parfois obsessionnelles ou égoïstes, elles conduisent inexorablement celles qui les éprouvent vers la déchéance, la maladie ou la mort.
La passion amoureuse définit pour
Balzac l'essence même de la féminité ; cette passion est généralement
malheureuse. Plusieurs exemples dans" La Comédie Humaine" montrent que
la passion féminine se renforce non seulement des obstacles auxquels elle fait
front, mais qu'elle se nourrit également de la force même et des contraintes du
destin. La sensibilité exquise, qui prédispose à la passion, est l'attribut de toutes
les femmes angéliques de Balzac, et ce quelle que soit la tranche d'âge à
laquelle elles appartiennent. En effet, l'amour et la passion n'ont pas d'âge
chez notre écrivain qui croit fermement que les femmes de trente, de quarante
et de cinquante ans ont une connaissance de l'amour, une capacité d'aimer et de
se dévouer supérieure à
D'un autre point de vue, toutes les héroïnes balzaciennes ne sont pas des creatures pures et nobles, des êtres passionnés et élégiaques. Quelques-unes d'entre elles incarnent des femmes coquettes, froides, puissantes, sans coeur et sans dévouement. Elles sont hermétiques à toutes les formes de tendresse et de sensibilité attribuées généralement aux femmes. Ce type
de personnages n'a d'ailleurs pas la sympathie de l'auteur qui se délecte à peindre les épreuves difficiles, les tortures psychologiques et les souffrances qui accablent parfois ces femmes si insensibles.
Le sourire et le rire, qui forment aussi des paroles du visage, la voix qui est un indicateur affectif, ainsi que le regard et toutes les autres parties de la face reflètent fidèlement les agitations de l'âme. L'analyse de Balzac est donc d'une grande cohérence. Les gestes du corps entier concourent avec les traits du visage pour traduire au dehors les innombrables mouvements de l'âme. De même, tout le comportement des femmes balzaciennes : leurs
regards, leur démarche, leurs gestes, leur ton de voix. dégage une tonalité émotive qui leur est propre et qui les distingue de l'homme.
Cependant, dans la société conservatrice du dix-neuvième siècle où la modération des sentiments et la discrétion des sensations sont prisées, le fait de laisser apparaître ses emotions et parfois même de se laisser gouverner par elles est nuisible à l'image de la femme que ce soit dans la douleur, la jubilation, la tristesse, la jalousie, la colère.
Mais taire sans cesse ses émotions, essentiellement lorsqu'elles sont douloureuses, ne va pas sans conséquences désastreuses sur l'état psychique et physique de la femme. C'est ainsi que Julie d'Aiglemont est tombée gravement malade et que Blanche de Mortsauf a succombé à des douleurs trop longtemps réprimées.
En définitive, le pathétique féminin trouvera son expression la plus vive dans ces madones balzaciennes dont un grand nombre est condamné à l'infortune ou au trépas.
Victimes de la barbarie d'un époux, de l'inconstance d'un amant, ou de l'acharnement malicieux du sort, elles sont continuellement la proie des émotions douloureuses et dévastatrices. Ainsi, le spectre de la mélancolie ne les quitte que rarement pour laisser place à d'évanescents moments de bonheur. Les émotions, violentes, débordantes ou refoulées, sont une cause de la perte des femmes.
Joris-Karl Huysmans,"Le Drageoir aux epices", Collection "Textes Litt.moderne Et Contemp, numéro 71",septembre 2003
LES ROMANCIERS NATURALISTES. BALZAC, STENDHAL, FLAUBERT, DAUDET, LES ROMANCIERS CONTEMPORAINS
AUTEUR: ZOLA EMILE
Edité par EDITIONS BERNOUARD
Paru en 1928
Eugénie Grandet est un roman d'Honoré de Balzac paru dans l'Europe littéraire en septembre 1833, sous le titre Eugénie Grandet, histoire de province.
Ursule Mirouët est un roman français d'Honoré de Balzac, publié dans le Messager, en août-septembre 1841, puis édité en volume en 1842, dans les Études de mours, section des « Scènes de vie de province » de la Comédie humaine.
Personnage dans l'oeuvre" Le Lys dans la vallée"; un roman d'Honoré de Balzac paru en 1836, s'insérant dans la Comédie humaine, dans la section des Études de mours, dans le deuxième livre Scènes de la vie de province.
|